Disons- le tout net, les peuples qui se sont soulevés en Afrique du Nord nous donnent une formidable leçon de courage et d’audace. Ils nous font faire un grand pas contre la résignation ambiante. Oui, on peut toujours élargir les champs du possible. Non l’histoire n’est pas écrite d’avance !
Qui eut dit que l’immolation d’un jeune homme, diplômé, harcelé par la police et dans l’incapacité d’assurer des conditions dignes de vie aurait créé cette trainée de poudre de déstabilisation des pouvoirs, d’aspiration à la liberté et cette irruption des peuples pour tenter de prendre leur destin en main. D’une certaine façon, c’est l’effet papillon. Mais c’est aussi pour chacune et chacun d’entre nous un appel : aucun n’engagement, lorsque la cause parle aux autres, lorsqu’il s’agit de la dignité humaine, n’est vain !
Indignez-vous ! Tout est parti de l’indignation des habitants de cette ville, solidaires de ce geste désespéré et qui prennent tous les risques plutôt que de voir leur jeunesse sombrer dans le trou noir du no-futur ! Ceux qui donnaient des leçons blasées aux lecteurs du petit opuscule de Stéphane Hessel en dénonçant l’inefficacité d’une telle attitude en sont pour leur frais. L’indignation est utile !
Mais ce qui a aussi fait la différence, est le courage, l’action collective, la détermination et la conviction. Rompre avec l’insupportable, même lorsque l’avenir est incertain est un devoir et n’est pas voué à l’échec. Et si nul ne connait l’issue de ce mouvement - bien des chaos, des périodes tendues, des errements peuvent suivre cette déstabilisation- le monde sera différent demain. Les tyrans pourront trembler sur leurs bases et tous doivent savoir qu’ils seront tôt ou tard rattraper par ceux qu’ils oppriment. Ceux qui se sont soulevés et ceux qui aujourd’hui encore sont menacés en Lybie nous disent : N’ayons pas peur !
N’ayons pas peur des autres, de faire face aux puissants et aux puissances !
Et nous qui vivons dans une démocratie, qui n’avons pas nécessairement à risquer notre vie pour changer l’ordre des choses, qu’attendons-nous pour élargir le champ des possibles, qu’attends nous pour ne plus tolérer l’insupportable, qu’attendons-nous pour nous faire entendre et imposer des décisions enfin conformes aux besoins et aux attentes du plus grand nombre, pour replacer la dignité humaine avant l’argent, les comptes, les profits, l’intérêt de quelques-uns ! Je n’appelle pas à la révolution, mais à ce que nos démocraties portent des transformations radicales. Elles pourraient, elles aussi, se trouver ébranlées si elles venaient à y manquer. Nos vieux pays se sont peut-être installés dans une crainte du changement, redoutant que demain soit pire qu’hier. Qu’ils mesurent l’énergie vitale de ces pays sortis il y a un demi-siècle de la colonisation et qui n’avaient pas encore trouvé les voies de leur liberté… Ils nous rappellent que la liberté n’est pas une idée usée. Pas plus que la fraternité et l’égalité. Car ils revendiquent des salaires décents, du travail, une juste répartition des richesses, une vie décente pour eux et leurs enfants. Et là, il y a encore tout à faire pour eux. Pour nous aussi ! Car ne l’oublions pas ce mouvement de libération est né d’une contestation sociale majeure ? Des bords de la Méditerranée, nous pouvons peut être agir de concert pour un progrès social partagé et sortir de ce discours sur l’aide au développement ! Travaillons à un co-développement, imposons un juste échange, inventons des grands projets communs au service des citoyens….
Pour l’heure, l’urgence est d’imposer le départ immédiat de Kadhafi de l’empêcher de nuire une minute de plus..
Demain est à construire et là nous mesurons la tragique absence du progressisme mondial, d’un mouvement socialiste international digne de ce nom, capable de présenter un cadre, des valeurs, une pensée, des objectifs communs, bref une perspective politique pour chaque peuple et pour le monde ! Vite un sursaut !