Communiqué de presse de Marie-Noëlle Lienemann, députée européenne (PSE), ancienne ministre
Présidence de l’UE : Nicolas Sarkozy nage en pleine duplicité dont l’idée européenne risque de payer les pots cassés tandis que les difficultés sociales et économiques vont hélas sans doute s’aggraver!
Nicolas Sarkozy n’a pas compris le NON français et prétend comprendre le NON Irlandais. Le bilan sera le même : le mépris des attentes réelles des peuples, en particulier des attentes sociales et la tentative de contourner le vote des citoyens.
Nicolas Sarkozy prétend obtenir des mesures de protections de l’UE mais ne s’en est pas donné les moyens et se prive du levier du Non irlandais pour obtenir une profonde réorientation de la politique européenne.
Nicolas Sarkozy déclare défendre aujourd’hui le principe de protections aux frontières de l’UE, en particulier contre le dumping environnemental, la possibilité d’obtenir des TVA abaissées sur les carburants, l’hôtellerie-restauration ainsi que les produits écologiques, ou encore faire prendre en compte l’objectif de croissance par la BCE. Tout cela vient bien tard. C’est au moment où les gouvernements européens voulaient trouver une sortie après le NON français, qu’il aurait pu infléchir nos partenaires et réorienter la construction européenne. Or il a fait tout le contraire : le mini traité qu’il a présenté comme permettant d’engager une nouvelle étape ne faisait que conforter ce qu’il veut changer aujourd’hui : l’unanimité pour toute décision fiscale, le refus explicite de toute harmonisation fiscale, l’indépendance de la BCE et le rappel de sa mission exclusive contre l’inflation et en faveur d’un Euro fort, la suppression de toutes barrières douanières aux frontières de l’Union. Sur ce dernier point où Nicolas Sarkozy a été particulièrement prolixe, la duplicité est flagrante car le mini traité est encore plus libéral et libre échangiste que les textes actuels. En effet, il y est prévu de supprimer en plus des taxes douanières toute autre forme de protection, à savoir les normes et autres règles, extrêmement nécessaires sur le terrain environnemental et social. Les français ne doivent pas être dupes du volontarisme verbal du président de la république, la réalité est qu’il s’est privé des moyens de peser et d’obtenir des garanties, des moyens d’agir au moment où il avait l’occasion de le faire. Et d’ailleurs s’il voulait réellement voir rapidement progresser ces protections qu’il appelle de ses vœux en Europe , il pourrait prendre appui sur le Non Irlandais pour demander que soit ré-éxaminer en profondeur certains points des traités existant plutôt que de poursuivre avec des institutions qui conforte une vision de l’Europe réduite à une zone de libre échange où la concurrence prime sur tout. Au contraire il imagine obtenir que les irlandais se contentent de quelques aménagements particuliers. Il se trompe d’époque et ne comprends pas la réalité et la dimension européenne de ce vote !
Nicolas Sarkozy veut faire croire que l’Europe n’aurait, pour le social, que le choix entre le nivellement vers le bas ou la concurrence pour laisser faire le dumping social en son sein. Cet argumentaire est, hélas, en cohérence avec la politique de recul social brutal qu’il veut imposer à notre pays.
Il y a pourtant une alternative, à savoir organiser une convergence progressive des standards sociaux de bases, en les harmonisant vers le haut, à l’image de ce qui a été réalisé pour les monnaies. Mais il est clair qu’il ne veut pas d’une Europe Sociale. Il fait semblant d’oublier que 70% de nos exportations se font en Europe et que les délocalisations dans d’autres pays européens aux bas salaires sont nombreuses. On voit les dégâts de ce dumping social chez les routiers par exemple ! La protection face à l’extérieur doit aller de paire avec une véritable solidarité et des progrès partagés à l’intérieur ! on notera de surcroit que Nicolas Sarkozy n’a évoqué ni la nécessité de nouvelles politiques industrielles, ni un développement de nouvelles initiatives européennes pour la recherche.. Il faut dire que cela exige des engagements financiers et de nouvelles politiques communes et que le président de la république s’est fait très avare en propositions concrètes unifiantes et opérationnelles.
Nicolas Sarkozy a beau émaillé de paroles sur « les drames humains » ses déclarations sur l’immigration, la réalité de ses propositions est un durcissement du traitement des étrangers sur le territoire de l’Union. Son silence sur les moyens renforcés que l’Europe pourrait consacrer au développement du Sud, sur les soutiens qu’elle pourrait apporter au développement de cultures vivrières en Afrique et la signature de nouveau accord de co-développement est très éloquent. Car ces décisions là pourrait très bien être rapidement prises et mises en œuvre…
Nicolas Sarkozy veut faire croire qu’il va chercher un accord sur le paquet « énergie-climat » avec les autres gouvernements, alors que sur le principe en est acquis. En revanche, il oublie complètement que le Parlement Européen décide avec le conseil des ministres et fait prendre pour décision arrêtée un accord franco allemand sur le CO2 des voitures, accord très en deçà du grenelle de l’environnement et des préconisations du Parlement Européen ! Lorsque ce dernier est en désaccord avec ses positions, il l’oublie, lorsqu’il est réactionnaire il l’appelle à la rescousse, oubliant au passage de souligner que sa majorité est de droite.
Cette confusion sur les mécanismes de prise de décision et sur les responsabilités des uns et des autres ne peut qu’entretenir l’incompréhension et le rejet des peuples..
Il répète à l’envie qu’il faut dire la vérité. En l’occurrence, il l’a
souvent travestie. Un exemple lorsqu’il annonce que la moitié des
gouvernements européens sont socialistes ou sociaux démocrates…
On a plus l’impression que Nicolas Sarkozy a surtout, sur France 3,
chercher à redorer son blason plutôt qu’à ouvrir une ère nouvelle dans
la construction européenne. Pourtant la multiplication des crises
impose une réorientation majeure. La TVA à 5,5 pour le restauration ne
saura faire office de succès face à l’urgence des choix et l’ampleur
des enjeux !