Daniel Cohn-Bendit, dans une interview donnée à Libération, soutient qu'il
conviendrait de voter en faveur des textes instaurant le Mécanisme Européen
de Stabilité. Il fustige au passage toute la gauche, qu'elle vote contre,
s'abstienne ou refuse de participer au vote sur ces deux textes, en particulier
parce que l'octroi des fonds dits de solidarité sera conditionné au vote du traité
de "discipline budgétaire" à venir, le fameux traité Merkel-Sarkozy.
En fait, il nous ressort les mêmes arguments qu'au moment du vote en faveur
de la constitution européenne et du traité de Lisbonne, expliquant alors
combien ils constituaient un pas en avant positif.
Faisant mine de ne pas voir qu'en réalité c'est une logique négative de régre-
-ssion sociale, économique et démocratique
qui s'installe !
Rappelez-vous: avec un président et des pouvoirs renforcés au Parlement
européen, l'Europe irait mieux. On a vu, on voit encore ! L'argument massue
est que, sans ce vote, sans ce MES, ce serait le chaos, l'impossibilité d'aider le
Portugal ou d'autres... Ce MES doit prendre le relais du fond FESF existant
jusqu'en 2013 ! Il n'est pas vrai que la solidarité serait impossible sans ce
mécanisme.
Visiblement Daniel Cohn-Bendit n'a tiré aucune leçon de l'échec de l'actuelle
méthode communautaire et il continue sur les mêmes rails refusant de voir que
se rapproche le mur dans laquelle l'Europe se dirige.
D'ailleurs, cette vision s'exprime étrangement dans l'interview qu'il accorde à Jean Quatremer:
"D’une part, il faut avoir conscience qu’Angela Merkel n’a accepté de payer
pour le MES qu’à la condition qu’on adopte le traité d’union budgétaire.
D’autre part, Hollande, s’il est élu, pourra conditionner la ratification du traité
budgétaire à l’adoption d’un second volet renforçant la solidarité financière et
d’unplan d’investissement destiné à relancer l’économie européenne."
Sa conception de la renégociation du traité Merkozy est en fait l'ajout d'un volet
complémentaire, mais pas une remise en cause des dogmes monétaristes et de
la règle d'or ! L'expérience de la discussion autour de l'ajout d'un volet social au
traité d'Amsterdam, qui instaurait le pacte de stabilité, a montré que c'était
une impasse! La renégociation doit être globale et redéfinir les choix
économiques, sociaux et monétaires pour sortir de la crise.
Daniel Cohn-Bendit estime que les difficultés grecques sont de la responsabilité
des dirigeants de ce pays. A l'évidence, c'est en partie le cas, mais le côté
récurrent des problèmes dans la plupart des pays de l'UE montre que le système
européen est aussi en cause. Il met en évidence les sondages où les Grecs
dénoncent leurs dirigeants et soutiennent l'euro. On peut les comprendre !
Mais ils sont encore plus nombreux à refuser les plans de la troïka européenne.
Et il faut se souvenir que la France, qui vote non à la constitution européenne,
est aussi à la même époque, dans les sondages, le pays le plus pro-européen.
En fait, les Français veulent une autre Europe. Il revient à la gauche de la rendre
possible. À coup sûr les Grecs ressentent comme la plupart des peuples, la
volonté de changer de dirigeants mais aussi de politiques et du coup d'Europe!
Au passage, je suis un peu surprise de la formule finale de son interview qui
témoigne d'une tentation réelle dans les institutions européennes de prendre
part à des choix et à des décisions qui doivent être assumés par les représentants
des peuples élus au niveau national. Dans les conditions pour sortir la Grèce de ses
difficultés Daniel Cohn-Bendit indique: "Enfin, il faut une réforme de l’Etat
pilotée par les Grecs et les Européens.
Côté État, comment faire confiance à ceux qui n'ont eu de cesse que de démanteler
les États et puissances publiques nationales, sans pouvoir ou même vouloir en créer
au niveau européen? Les grandes recommandations européennes aux Grecs sont
d'ailleurs de privatiser et de libéraliser, sans chercher du côté des éxonérations
d'impôts dont bénéficient les armateurs et l'Eglise!
Vraiment, ce n'est pas sérieux!