Interview du 22 AOUT 2008 dans LIBERATION:
Députée européenne, représentante de l’aile gauche du Parti socialiste, Marie-Noëlle Lienemann analyse les enjeux de l’université d’été de La Rochelle, dans neuf jours, et du congrès de Reims, en novembre.
Que vous inspirent les rapprochements de l’été au PS ?
Ce qui se passe au PS est assez sordide. Ces batailles d’appareil, c’est: «on prend les mêmes et on recommence» et «demain sera comme hier». Le jeu consiste à rebattre les cartes entre les mêmes mains. Nos dirigeants sont à côté de la plaque s’ils croient retrouver la confiance du peuple de gauche par une simple recomposition d’appareil.
Le PS ne souffre-t-il pas d’un déficit de leadership ?
Il y a une réalité que tout le monde élude : aucun des leaders du PS ne s’impose comme chef suffisamment crédible pour entraîner une majorité. Ce qui se prépare ce sont des coalitions avec, dans chaque bloc, une compétition entre ténors. Et ceux qui n’auront pas gagné, joueront à l’extérieur jusqu’à la présidentielle ! Bref, on risque de se retrouver dans la configuration qui nous a menés à la défaite.
Le PS peut-il encore se rénover ?
Deux perspectives peuvent apporter du neuf : que la gauche du PS soit l’axe de la future majorité et que le parti se dépasse au sein d’un nouveau grand parti de toute la gauche.
La gauche du PS peut-elle prétendre rassembler ?
Unie, elle fait 20 à 25 %. Soit un bon quart du parti. Elle pèse plus que chacun des leaders des autres courants. Elle dispose d’une légitimité politique : avec la fin du cycle néolibéral, c’est le moment d’être alternatif et de sortir de l’accompagnement. Ce devrait être le temps de la gauche. Beaucoup de nos fondamentaux sont d’actualité : qui a parlé de la taxe Tobin, de réguler les flux financiers, etc. ?
Mais vous n’avez pas de leader…
Ce n’est pas parce que la gauche du PS n’a pas de présidentiable affiché ou de pseudo-premier secrétaire autoproclamé qu’elle n’a pas d’existence politique. Ne pas avoir de chef fait aussi notre force puisque cela permet de coaliser sur une stratégie et une orientation. Dans nos rangs, Benoît Hamon pourrait être premier secrétaire, mais il n’y pense pas tous les jours en se rasant.
Qu’attendez-vous de La Rochelle ?
La Rochelle arrive à un moment clé. Ce que les gens attendent du Parti socialiste, c’est une opposition forte, capable de porter une alternative en fédérant toute la gauche, associative, militante et citoyenne. Sinon ce sera la fossilisation et l’échec.