Contreparties des banques : Pourquoi le compte n’y est pas ?
Comme de coutume Nicolas Sarkozy communique et prend les français pour des gogos. L’affaire avait été bien orchestrée : les français allaient voir enfin un gouvernement exigeant avec les puissants qui obtiendrait de vraies contreparties aux aides que les contribuables accordent aux banques pour sauver nos économies ! Alors, grandes déclarations du président de la république exigeant que les patrons des banques renoncent à la part variable de leurs rémunérations. Christine Lagarde relaie pour bien montrer comment le gouvernement doit affronter une résistance importante. Deux des responsables d’une grande banque annoncent triomphalement qu’ils se rangent à ces injonctions puis viennent les autres. Grande victoire, la presse titre : Nicolas Sarkozy a fait plier les banquiers ! Sans doute le gouvernement imagine-t-il que les français, qui eux tous les jours subissent les conséquences désastreuses du délire du capitalisme financier et des pratiques bancaires (appelées hier l’innovation financière), vont ce satisfaire de cet « effort » exigé des dirigeants de banque ! C’est une piètre « moralisation » du capitalisme.
Première question : combien de membres de la direction de chaque banque ont-ils ainsi vu leur part variable réduite ? Pourquoi ne pas avoir demandé le reversement à l’Etat des stock-options versées depuis 10 ans à ces dirigeants ? En effet, ils se sont enrichis en préparant une déstabilisation majeure de nos économies. Leurs bonifications d’hier étaient donc indues. Qu’ils les restituent et au moins les stock-options !
Deuxième question : pourquoi n’avoir pas exigé de surcroit que l’éventail des salaires soit considérablement réduit dans ces banques aidées par la puissance publique ? Un fait divers dramatique a montré- une employée de banque poignardée par un client éconduit- que ce sont les agents commerciaux des banques qui tous les jours subissent les difficultés tant des dépositaires que des citoyens qui veulent un crédit ou un chef d’entreprise de TPE et PME qui voit le spectre de la cessation d’activité. La moindre rémunération de leurs dirigeants n’amène à aucune amélioration pour les autres salariés !
Troisième question : pourquoi ne rien imposer aux banques qui les obligent à changer leurs pratiques et à agir pour relancer l’économie réellement ? Pourquoi ne pas leur avoir imposé de retirer tous leurs dépôts bancaires dans les paradis fiscaux et leur interdire tous nouveaux versements dans ces pays ? N’oublions pas que la moitié des échanges et des placements financiers mondiaux s’opèrent dans ou depuis ces paradis fiscaux. Mais cette moralisation là du capitalisme touche directement au porte monnaie, aux profits (avantages fiscaux considérables) et là la moralisation atteint vite ses limites !
Pourtant cette mesure aurait de vraies conséquences. D’une part cela rapatrierait de l’argent dans des pays où ils pourraient être réinvestis au profit de l’activité économique, et en particulier en France. Ensuite, ces sommes devraient enfin payer des impôts, ce qui réduirait les déficits.
Quatrième question : pourquoi ne pas engager immédiatement une vaste campagne de recherche de la fraude fiscale ? Il y a là un gisement considérable de recettes pour diminuer nos déficits et avoir des marges de manœuvre pour la relance. C’est vraiment le moment car dans des périodes troublées comme celles que nous vivons rendent plus difficiles les mouvements d’évasion fiscale. Le Conseil des Prélèvements Obligatoire estime la fraude fiscale et sociale entre 29 et 40 milliards d’euros (dont 70 % de fraude fiscale), mais précise qu’il s’agit d’un « plancher » qui n’intègre ni les irrégularités ni l’évasion fiscale internationale. La Commission européenne évalue la fraude fiscale entre 2 et 2,5 % du produit intérieur brut, soit 37 à 47 milliards d’euros. Le Snui l’évalue entre 42 et 51 milliards d’euros. Quelque soit le montant de l’évaluation, et l’approche sur laquelle elle repose, il est colossal.
Cinquième question : quels mesures effectives seront prises pour limiter le versement des dividendes des actionnaires ? Un engagement moral des banques ne suffit pas. Pourquoi ne pas créer une taxe confiscatoire – au moins temporaire- sur la hausse des dividendes, et à minima si celle-ci dépasse l’inflation ?
Sixième question : des annonces alarmantes du niveau bien supérieur que celui jusqu’ici annoncé de produits toxiques tant dans les banques allemandes qu’anglaises et américaines montrent que nous ne sommes pas au bout de la crise financière et que même on peut redouter une crise monétaire. Qui peut croire qu’il n’y a aucune banque française qui ne se trouve dans une situation du même ordre ? Pourquoi le gouvernement ne veut il pas transformer en capitaux publics, en actions les aides publics de recapitalisations, alors que cela permettrait à l’Etat de siéger au conseil d’administration des banques aidées et donc de connaitre la vérité sur leur situation et de veiller aux décisions stratégiques ? Pourquoi ne pas nationaliser Dexia, la banque des collectivités locales alors même qu’on sait que bon nombre d’entre elles ont des emprunts redoutables, car relevant de ces produits toxiques ? Les communes, départements et régions risquent ainsi d’être totalement étranglées. Il faut leur permettre de renégocier dans d’excellentes conditions leur dette pour retrouver des marges de manœuvre, pour réinvestir et contribuer à la relance de notre économie.
Ne restons pas silencieux devant cette opération de communication : Non, Nicolas Sarkozy ne fait pas ce qu’il faut pour faire plier les banques et les amener à changer leurs pratiques !